En toute sincérité : Dérive extrême !

François MENSAH 30 décembre 2013

Les faits sont d’une extrême gravité. Et s’ils ne s’étaient pas déroulés sous nos yeux, nous aurions du mal à y croire. Et pourtant, c’est bel et bien à Cotonou, la vitrine du Bénin, que des travailleurs ont été sérieusement molestés pour avoir voulu rendre publique leur légitime désapprobation vis-à-vis de ce qu’ils considèrent comme les abus d’un pouvoir qui, selon eux, ne garantit pas à tous les niveaux la liberté d’expression, la sécurité des populations et le droit à l’opposition. Vingt-trois ans après la conférence nationale des forces vives de la nation, un événement unique qui a réuni de nombreux Béninois qui, ensemble, ont chanté à tue-tête « plus jamais cela chez nous », une marche pacifique a été réprimée dans le sang. Et ceci sur ordre d’un préfet qui de surcroît ne remplit même pas les conditions fixées par la loi pour occuper son poste actuel. En vérité, le préfet devrait en toute dignité jeter le tablier et abandonner ses fonctions pour soulager sa conscience. Cette attitude sordide des hommes en armes qui furent à sa solde risque purement et simplement de lui rester en travers du gosier. Et dans ce cas, il ne doit pas être fier d’occuper son poste. Sinon, comment comprendre qu’on puisse refuser aux défenseurs des droits des travailleurs de s’insurger contre la violation de leurs attributs ? Comment peut-on également empêcher le peuple, à travers ses représentants, de manifester contre la croissance vertigineuse de la corruption, de dénoncer des actes de barbarisme tels que celui perpétré sur la personne du président de l’Ong Alcrer Martin Assogba et de désapprouver un concours dont les résultats, visiblement scandaleux, ont été quand même validés par un gouvernement apparemment complice de cette mascarade que dénoncent plusieurs travailleurs ? Au finish, tout citoyen béninois peut se demander comment est-ce que la situation a pu dégénérer jusqu’à ce point sans que les autorités publiques n’aient pris les décisions adéquates temps afin d’apaiser les acteurs de la fronde sociale. Mieux, le Bénin qui, il y a de cela quelques années, faisait école en matière de respect des libertés, du droit d’expression et de manifestation de la démocratie n’est apparemment plus un exemple dans la sous-région et sur le continent. La terre de Béhanzin et de Bio Guerra n’a apparemment plus de leçon à donner à ses voisins. Les données ont, semble-t-il, changé. Ici, désormais, il faut se taire, se résigner, abdiquer et ne pas contester. Ceux qui ne répondent pas à cette logique en font les frais. L’exemple peu reluisant du vendredi dernier à la bourse du travail n’honore guère la République. On se croirait dans une Nation gouvernée par un patriarche obnubilé par le culte de la dictature et la phobie de la contradiction. Non loin du Bénin et plus précisément au Niger, des milliers de personnes ont marché, samedi dernier, sans retenue contre le président Mahamadou Issoufou pour dénoncer la corruption et la dictature qui caractérisent sa gestion du pouvoir. Chose curieuse, les images de cette contestation ont été diffusées en premier à l’ouverture de la grande session d’information du soir sur la télévision nationale nigérienne. Et ceci, figurez-vous, avant le passage des reportages liés aux activités du parti au pouvoir au pays de Diori Hamani. Cela n’a pas ôté à l’homme fort de Niamey son statut de président de la République du Niger. C’est un exemple de démocratie qui devrait faire école au pays de Boni Yayi. Une chose est sûre, les travailleurs ont porté leur croix. Ils ont été sauvagement matés pour avoir voulu réclamer certains droits. L’histoire retiendra ces tristes épisodes de la gouvernance Yayi. Le père du changement, géniteur de la refondation ne doit guère l’occulter. Le préfet tortionnaire doit également se souvenir de cet adage qui dit que celui qui sème le vent récolte la tempête.



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