En toute sincérité : Le Bénin à l'heure du retard !

François MENSAH 4 avril 2013

Les Béninois parcourent monts et vallées, traversent les océans et écument les frontières à la recherche d’investisseurs capables d’aider leur patrie à sortir de la piteuse famille des pays les moins avancés du monde. Désireux d’arpenter les sentiers de l’émergence et du développement, mes compatriotes ont parfois des attitudes qui contrastent avec cette envie d’améliorer leurs performances au plan économique et social. En effet, le pays se comporte à des moments donnés comme si ce désir d’avancer n’était qu’un rêve perdu au milieu d’ambitions basées sur un manque de conviction. Sinon, comment comprendre cette propension à oublier le temps qui est un facteur capital dans l’établissement de toute œuvre de développement ? Les gouvernants locaux ont malheureusement pris l’habitude de négliger le temps au point d’occulter ses lourdes conséquences sur l’aboutissement des différents projets de société. Le temps, cette donnée capitale dont il faut tenir compte en classant les priorités échappe régulièrement à l’œil pourtant vigilant des décideurs qui l’oublient si souvent à leurs risques et au péril des populations. Un célèbre adage dit pourtant que le temps c’est de l’argent. Time is money. Le chroniqueur a la douloureuse impression que sa Nation veut être l’objet d’une monstrueuse exception en matière de gestion du temps et des opportunités. C’est du moins ce que laissent croire certains agissements. La haute politique n’est que le bon sens appliqué aux choses disait Napoléon 1er. Le Bénin a le choix entre l’envie de grandir et le plaisir de périr. Le pays peut comprendre le plus tôt la valeur du temps ou alors l’ignorer purement et simplement. Ce qui bien entendu ne ferait que l’enliser davantage dans la catégorie des états en quête de développement. Le Bénin à mon humble avis est en retard sur beaucoup de choses. Tenez par exemple, il est prévu depuis fort longtemps, la tenue des élections municipales, communales et locales, mais mon pays a eu le mérite de ne pas être prêt pour cette échéance. La correction de la liste électorale n’a d’ailleurs pas fini de diviser les élus du peuple qui se sont attaqués à cette tache tardivement. Marcel Proust nous a pourtant enseigné que l’audace réussit à ceux qui savent profiter des occasions. Or au Bénin, on a le sentiment qu’on ne profite jamais des occasions offertes par l’histoire pour corriger le tir. Pire, certains faits rendent le peuple sceptique sur la capacité de ses gouvernants à bénéficier des bonheurs du temps. Il serait d’ailleurs inutile de rappeler à mes contemporains qu’il y a bien longtemps qu’on savait que l’ancien Directeur général de la police nationale et son adjoint étaient admis à faire valoir leurs droits à la retraite, tout comme le désormais ex patron de la douane. Rien n’a été fait pour procéder à leur remplacement en temps utile. Bien au contraire, toute la République semble surprise par leurs départs respectifs, au point où la désignation de leurs remplaçants constitue un os dans la gorge des gouvernants. Ce genre de situation pose une véritable équation concernant la façon dont les affaires publiques sont gérées. Le président de la république n’est pourtant pas avare en initiatives visant à améliorer les performances des secteurs clés de l’économie tels que le port autonome de Cotonou. Boni Yayi multiplie ses visites dans l’enceinte portuaire afin de lui insuffler un précieux souffle. Le locataire de la Marina oublie malheureusement que l’actuel directeur général est un intérimaire. Il serait plus simple de le confirmer à son poste afin de lui laisser la latitude de se concentrer sur sa mission. Dans le cas, contraire, il faut alors le remplacer si c’est ce qui est souhaité au plus haut niveau. Malgré toute sa volonté d’agir dans le sens du développement de son secteur l’actuel directeur ne pourra pas fournir des résultats efficaces s’il n’est pas en mesure de travailler en toute sérénité. Gérer les difficultés quotidiennes du port et assurer un intérim dont on ne connait pas les lendemains ne sauraient guère lui donner les chances d’accomplir son devoir dans les normes. Voilà autant de situations qui devraient pousser nos gouvernants à revoir leur manière de gérer les affaires de la République et à prendre le temps comme une donnée dont il faut inéluctablement tenir compte. A force de remettre à demain ce qui peut se faire aujourd’hui, le pays risque de croiser le malheur en chemin. Pierre Drieu la Rochelle disait à juste titre que nous saurons qui nous sommes quand nous verrons ce que nous avons fait. Boni Yayi a encore le temps de reconsidérer le temps car mieux vaut tard que jamais.



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