En vérité : L’article de la dissension

14 juillet 2020

Pour une fois, ils n’ont pas réussi à accorder leur violon. Habitués à parler d’une même voix depuis leur installation, les députés de la 8ème législature ont montré, il y a peu, des signes de dissension. A la surprise générale, alors que le projet de révision du règlement intérieur de l’institution parlementaire devait passer comme une lettre à la poste, il y eut un peu comme une remise en cause de la discipline de groupe. La période de suspension des débats consécutive à la manifestation des premiers signes de désaccord n’a pas arrangé les choses. A la reprise de la plénière le lundi 6 juillet dernier, les contestataires sont restés campés sur leur position. Il n’en fallait pas plus pour que le président de l’Assemblée nationale, pressé par le temps et les délais incompressibles, clôture la session ordinaire ouverte quelques mois plus tôt. Rendez-vous a été pris pour une session extraordinaire.
Ce jour, mardi 14 juillet, les élus du peuple se retrouveront à nouveau pour poursuivre les discussions sur le même sujet. L’article 24 nouveau, objet de la remise en cause de l’harmonie ayant prévalu jusque-là, sera au cœur des échanges. Selon le texte présenté par Orden Alladatin, président de la commission des lois, des droits de l’homme et de l’administration, les députés s’organisent en groupes parlementaires par parti politique. Ainsi, le député d’un groupe parlementaire donné ne peut plus s’associer à un autre qui n’est pas de son creuset. Face à tant de rigidités, le ton est monté d’un cran. Le front ouvert par Nassirou Arifari Bako, Augustin Ahouanvoèbla, Assan Séibou, Abdoulaye Gounou, Benoît Dègla, pour ne citer que ceux-là, s’est opposé à ces nouvelles règles qui tendent à révolutionner les pratiques parlementaires. Pour ces députés, on ne saurait transposer l’organisation interne d’un parti politique à un groupe parlementaire.
Le long débat qui a suivi la réaction des contestataires est la preuve de ce qu’ils ne sont pas prêts à valider le texte tel que proposé par la commission des lois. Nassirou Arifari Bako qui a pris le lead des opposants circonstanciels milite pour le maintien de l’ancienne formulation de l’article 24, objet du désaccord. Le régime parlementaire, dans lequel le parti qui a la majorité à l’Assemblée nationale dirige le gouvernement, n’étant pas l’option du Bénin, les frondeurs n’ont pas voulu ouvrir la brèche d’un précédent. Ils sont restés fermes et le moins qu’on puisse dire est que leur lutte a payé. Du moins, la dernière fois. Qu’en sera-t-il aujourd’hui ? L’eau a-t-elle entre temps coulé sous le pont ? Ce qui est certain, il ya eu des échanges informels pour essayer d’arrondir les angles avec ceux qui n’ont pas d’accord avec la révision de l’article 24.
Ces pourparlers, inévitables dans un tel contexte, vont-ils prospérer ? Les postures qui seront adoptées au cours des prochaines heures renseigneront l’opinion sur l’efficacité des tractations qui ont cours avant la plénière. Si par extraordinaire, le même scénario se répète, c’est que quelque part, les députés concernés tiennent vraiment à une certaine autonomie à l’Assemblée nationale. Il a fallu attendre un an avant que des velléités de dissension s’enregistrent. A huit mois de la présidentielle, ce fait n’est pas anodin. Il annonce sans doute d’autres surprises auxquelles l’opinion aura droit au fur et à mesure qu’on s’approchera de cette échéance capitale dans une démocratie. Chose intéressante, les députés dits contestataires sont tous de vieux routiers de la scène politique béninoise. Ce sont de fins connaisseurs des méandres du parlement et ils sauront se servir des expériences acquises au fil des années pour s’exprimer. Plus que quelques heures et on en saura davantage sur le sort réservé au fameux article 24, objet de la dissension.



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