En vérité : La charte du renouveau

Moïse DOSSOUMOU 30 juillet 2018

Le terrain vient d’être balisé pour la réforme du système partisan. En politique, jusqu’à nouvel ordre, plus rien ne sera comme avant. En adoptant ce jeudi 26 juillet 2018, la loi n°2018-23 portant Charte des partis politiques en République du Bénin, l’Assemblée nationale a manifesté sa volonté de procéder quelque peu à l’assainissement des mœurs politiques. Louis Vlavonou et ses pairs initiateurs de cette proposition de loi peuvent se féliciter d’avoir convaincu leurs collègues de rompre avec le passé. Lorsque ce texte de loi aura fini le tour du circuit législatif avec l’étape de la promulgation, la recomposition des forces politiques, déjà en cours, s’imposera à tous. Soit les formations politiques traditionnelles acceptent de faire peau neuve avec le concours d’autres alliés, soit elles assisteront impuissantes à leur requiem. Presque à l’unanimité, les élus du peuple s’inscrivent dans une nouvelle dynamique, celle de la réforme du système partisan.
Composée de 70 articles répartis en 8 titres, cette loi vient mettre un terme à la création de la pléthore de partis politiques qui poussent de terre comme des champignons. Dépourvues d’une assise nationale, la plupart de ces formations politiques n’ont de fiefs que des quartiers, villages, quartiers de ville et arrondissements. Dans le meilleur des cas, leur influence s’étend au niveau de la commune et du département. On peut compter du bout des doigts les partis politiques qui réalisent des prouesses électorales dans plusieurs départements. Contrairement à l’ancienne charte des partis politiques qui n’exigeait que 120 militants au plan national pour la création d’un parti politique, il faudra désormais réunir 1155 membres fondateurs à raison de 15 par commune. Ce bouleversement vient donner du tournis au personnel politique habitué à donner naissance aux mouvements politiques pour un oui ou pour un non. A présent, il leur faudra négocier autrement leur survie.
Avec cette nouvelle loi, la Commission électorale nationale autonome (Cena) se targue le privilège de contrôler le financement public des partis politiques. Dorénavant, « seuls les partis politiques ayant obtenu, lors des élections législatives précédant l’exercice au cours duquel le financement est acquis pour la durée de la législature, un nombre de députés correspondant à un cinquième (1/5) du nombre de députés composant l’Assemblée nationale et provenant d’un nombre de circonscriptions électorales équivalant au minimum au quart (1/4) du nombre total des circonscriptions, peuvent bénéficier du financement public ». Pour bénéficier de l’appui financier de l’Etat, les partis politiques ne peuvent pas se soustraire à ces deux exigences légales cumulatives. La loi est dure, mais c’est la loi. Les acteurs politiques devront faire sous peu une nouvelle expérience en conjuguant leurs efforts. Il ne leur sera plus possible d’évoluer en rangs dispersés comme cela a toujours été le cas depuis le renouveau démocratique.
C’est un fait que les députés adhèrent à la réforme du système partisan prôné par le chef de l’Etat. Déjà en 2015, lors de sa prise de fonction, Adrien Houngbédji insistait sur l’impérieuse nécessité pour le personnel politique de sortir des sentiers battus. La volonté affichée par Patrice Talon depuis qu’il a été investi à la tête de l’Etat quant à la refonte des mœurs politiques a également été déterminante dans ce processus qui est sur le point d’aboutir. Les acteurs politiques qui ont souscrit au toilettage de la Charte des partis politiques sont face à l’épreuve de la cohésion. Au risque de disparaître, il leur faudra démontrer maintenant que « ce qui les unit est beaucoup plus fort que ce qui les divise ». Ce challenge, c’est à eux de le relever. Ils n’ont plus droit à l’erreur. Le compte à rebours a commencé.



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