En vérité : Repenser les fêtes identitaires

Moïse DOSSOUMOU 16 août 2018

Elles sont très prisées par ici. A chaque édition, les fêtes identitaires, cultuelles et culturelles drainent un monde fou. Occasions annuelles de retrouvailles, ces rendez-vous suscitent un réel engouement au sein des populations. Les ressortissants de telle ou telle localité mettent un point d’honneur à se retrouver dans leurs contrées d’origine pour passer d’agréables moments. Des spectacles divers, des cérémonies cultuelles, des conférences-débats constituent, dans la plupart des cas, les moments forts de ces événements. Vêtus avec le pagne pris pour la circonstance, ne voulant aucunement se faire conter les grandes étapes de ces moments de détente et de convivialité, les participants s’invitent sur les lieux des festivités. Le but poursuivi, c’est la promotion de la culture endogène, de l’unité et du développement. Mais en réalité, ces retrouvailles se limitent essentiellement aux agapes. On y vient pour manger et boire à satiété. Le reste importe peu.
Hormis la Gaani qui a conservé son caractère cultuel et culturel, la quasi-totalité des autres fêtes identitaires est basée sur les réjouissances. Qu’il s’agisse du Nonvitcha, du Wémèxwé, du Festival international du Danxomè, de la fête de l’igname et du Tolikunkanxwé, pour ne citer que ces creusets, les participants ne s’y intéressent que pour s’empiffrer. Les autres aspects de ces retrouvailles ne priment pas sur les festivités. Or, ces occasions devraient être exploitées autrement par les têtes pensantes et les pouvoirs publics pour susciter et maintenir une dynamique locale de développement. Malheureusement, les politiciens avides de popularité, désireux de faire bonne presse, se retrouvent sur les lieux pour faire les yeux doux aux potentiels électeurs. Accompagnés de leurs états-majors respectifs, les hommes politiques ne manquent pas d’exploiter ces rendez-vous populaires pour se montrer. Hier à Savalou, berceau de la fête de l’igname, ils n’ont pas dérogé à la tradition.
Depuis un peu plus de 90 ans que la commune de Grand-Popo sert de cadre aux retrouvailles dites Nonvitcha, rien ou presque rien n’a bougé dans la localité. Du fait des affres causées par l’avancée vertigineuse de la mer, la commune se dépeuple chaque jour un peu plus. Les jeunes fuient la localité dépourvue de tout attrait économique. La mer qui constitue la ressource naturelle du milieu est devenue un sujet d’inquiétude. A l’occasion de cette fête identitaire, des réflexions devant aboutir à des propositions devraient être nourries et soumises aux décideurs. Les questions liées à l’épanouissement des jeunes et des femmes, à l’accès aux soins de santé, à la promotion des opportunités économiques, sont censées être les préoccupations de tous les instants. Certes, des réalisations sont effectuées chaque année, mais elles sont loin de combler les attentes. C’est ce défi que doivent relever les ressortissants de la vallée de l’Ouémé qui doivent aller plus loin en mettant en œuvre une bonne politique de promotion de cette vaste étendue de terre fertile.
La commune de Savalou qui était à l’honneur hier, en dépit de ses potentialités, n’attire pas d’habitude grand monde. La fête de la nouvelle igname célébrée tous les 15 août est une opportunité pour les ressortissants de la localité de réfléchir sur l’essor de leur territoire. Hélas ! Hier, tout le monde n’avait d’yeux que pour les plats fumants d’igname pilée. Et ce sera encore le cas pour les autres éditions, à moins que le déclic survienne d’ici à là. Le gâchis orchestré par les différentes communautés autour des fêtes identitaires interpelle l’opinion. C’est bien de fêter, de manger, de boire et de danser. Mais la saveur de ces retrouvailles serait encore plus agréable si un accent particulier était mis sur la promotion du développement local. Tout ne peut être fait par le gouvernement et les élus locaux. L’apport et la mobilisation de chaque communauté en termes d’idées et de propositions pertinentes suffisent à forcer la main aux décideurs.



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