Propositions de révision des lois électorales du Br, de l’Upr et Ld : Guerre de positionnements pour 2026

21 février 2024

Les exigences de légitimité des parrains, d’égalité entre les parrains et de légalité c’est-à-dire de respect des textes, ne suffisent pas pour faire croire que les mêmes députés Br et Upr qui avaient participé aux révisions de la Constitution et du Code électoral en novembre 2019, sont devenus subitement vertueux. Les députés Ld qui ne siégeaient pas à l’époque de ces précédentes révisions devraient avoir les propositions les plus attendues, suite à la décision de la Cour constitutionnelle du 04 janvier 2024 invitant l’Assemblée nationale à modifier le code électoral pour rétablir l’égalité entre les attributeurs des parrainages aux candidats à la présidentielle. Mais pour les trois partis, c’est la course à la Marina qui a déjà commencé.
Le Conseil constitutionnel sénégalais n’a donné aucune une leçon à la classe politique béninoise par sa réponse à un recours des députés de l’opposition de ce pays. C’est plutôt l’inverse. Avec la constitutionnalisation par le législateur béninois de 2019 des dates de scrutin, il n’est plus laissé au président de la République, ni le loisir de convoquer le corps électoral, ni celui de renoncer à cette convocation. C’est aussi faux de dire que certaines des propositions de révision initiées par les députés béninois visent un 3ème mandat. Le Bénin n’en est plus à ce niveau. C’est enfin surtout faux de croire que l’Upr soutient la proposition d’amendement de l’He Assan Séïbou, président du groupe parlementaire Br. Une telle proposition ne saurait être du goût du parti de Joseph Djogbénou qui se veut refléter le plus fidèlement, l’opposition du chef de l’Etat à toucher à la Constitution et sa préférence pour un parrainage par les élus de 2026, qu’il juge plus légitimes que les actuels, pour parrainer.

Olivier Boko, au carrefour de la majorité présidentielle
Alors que le président Assan Séïbou propose de modifier les dates constitutionnelles des scrutins et d’habiliter les maires de 2020 et les députés de 2023 à parrainer, son collègue Aké Natondé, du groupe parlementaire Upr, offre au contraire de ne pas toucher à la Constitution mais plutôt au Code électoral en réduisant de 15 jours, prévu pour le dépôt des candidatures à la présidentielle, histoire d’habiliter les maires et députés de 2026, tous à égalité de pouvoirs, de parrainer les candidats à la succession de Patrice Talon, comme le souhaite ce dernier. Avec deux positions aussi opposées, l’Upr ne peut pas prétendre, comme le laissent entendre ses personnalités tant sur le terrain que dans les médias, soutenir la proposition de révision du député du Br, alors que les mêmes se plaignent déjà sous cape, de l’engagement sans retenue sur le terrain, d’anciens ministres, actuels députés, maires et simples militants ou membres des instances dirigeantes de l’Union progressiste en faveur de l’opérateur économique et évangéliste Olivier Boko dans la perspective de 2026. Car au même moment, son président Joseph Djogbénou multiplie sur le terrain ses actions de mobilisation en vue des mêmes élections générales. Il n’est donc pas pertinent de dire que la position officielle de l’Upr va dans le sens d’un parrainage par les députés et maires actuels sur lesquels son emprise s’effrite de jour en jour. Dans de telles conditions d’incertitude, il lui serait plus inspiré de parier sur les candidatures et élus de 2026 pour espérer avoir de nouveaux soutiens plus maîtrisables. Du côté du Br, le fait que Abdoulaye Bio Tchané ne soit pas partant pour la présidentielle de 2026, a laissé un terreau fertile à la vague Olivier Boko, lui qui a été témoin et acteur des premiers pas des partis de la majorité, issus de la réforme du système partisan.

L’opposition Ld en mode chat échaudé
Il se murmure dans les rangs des députés Ld que l’argument majeur servi pour les motiver à voter pour la révision, c’est que parmi les 28 députés actuels du parti de Boni Yayi, beaucoup seraient déjà dans la tendance favorable au même Olivier Boko et que, à l’instar de la logique Upr, ils n’auraient meilleur sort aux élections générales qu’avec des parrains élus en 2026. Malheureusement, ce parti d’opposition revient de très loin et est passé par tous les supplices pour obtenir la minorité de blocage qui fait sa force au sein de la 9ème législature. Il rêve désormais d’élargir ses possibilités de parrainages au-delà de son groupe parlementaire, pour gagner aussi des mairies qui manquent à son escarcelle. Atteindront-ils cet objectif en mettant les députés actuels dans le doute et le regret de ne pas être parmi les faiseurs de roi de 2026 ? En attendant d’en savoir plus sur la proposition qu’opposera le groupe parlementaire dirigé par l’He Noureini Atchadé à ses collègues du Br et de l’Upr, il est fort à parier qu’il évitera de se contenter d’une révision de la Constitution, aux détours de retouches ordonnées par la Cour constitutionnelle suite à la requête d’un citoyen. Chat échaudé craignant l’eau froide, Les Démocrates se méfieront de la révision de la Constitution proposée par l’He Assan Séïbou et préfèreront plutôt le faire dans le cadre du dialogue politique devenu leur leitmotiv. Ils privilégieront des amendements au code électoral et renonceront tout autant au renvoi proposé par l’He Natondé, des parrainages à des élus hypothétiques de 2026, alors qu’ils savent combien leur participation peut être limitée par les difficultés d’obtention de quitus fiscaux et bien d’autres incapacités judiciaires qui peuvent leur tomber sur la tête d’ici à 2026. Ce débat né du recours introduit par le citoyen Grégoire Gbêho aura finalement induit un ajustement des stratégies des partis autour des présidentiables les plus prometteurs. Vu la clé de voûte que constitue le président de la République dans le système institutionnel d’un régime présidentiel comme celui du Bénin, tous les choix seront guidés davantage par la présidentielle de 2026, que par les législatives et les communales qui viennent.
Une contribution de Ange TOSSOU



Dans la même rubrique