Haute Cour de la justice : une épine pour la démocratie

Arnaud DOUMANHOUN 22 octobre 2015

Après 17 années de révolution, la joie de la liberté retrouvée a voilé le visage à toute une Nation. Les cadres et les politiques ont tiré profit de cette exultation débordante et anesthésiante des Béninois. En érigeant le monstre inoffensif de la Haute Cour de la justice, institution chargée de juger les personnes ayant occupées de haute fonction au sommet de l’Etat, les pères de la conférence nationale de février 1990 se sont mis à l’abri. En effet, le régime révolutionnaire avait instauré un mode de sanction implacable contre les détournements de deniers publics, et puisqu’il était question de reprendre les affaires aux militaires, les participants à la conférence nationale ont eu l’ingénieuse idée de proposer un organe qui va désormais connaître du sort des hautes personnalités, les mêmes qui siégeaient à ces assises. Conséquence, 25 ans après la conférence nationale, la Haute Cour de la justice s’est révélé être un épouvantail dont se servent certains chefs d’Etat pour afficher une fausse détermination à lutter contre la corruption. Au fonds, tout le monde est convaincu que la complexité du mécanisme de son fonctionnement ne lui permettra jamais de connaître du jugement de ces personnes privilégiées de la République qui volent sous l’immunité de la loi. Pourtant l’on assiste passivement à un enchaînement infécond des mandatures. La Haute Cour de justice censée planer comme une épée de Damoclès sur la tête des gouvernants est devenue un monstre pour les finances publiques. Une institution budgétivore qui saigne les caisses de l’Etat. Surtout, n’avancez pas la perversion de l’esprit de la loi. Car, la loi telle rédigée par les pères fondateurs du renouveau démocratique, dans son esprit comme dans sa lettre est disposé de telle sorte que les gros voleurs ne soient jamais jugés. La preuve, malgré les nombreux scandales financiers étalés sous les différents régimes qui se sont succédés jusque là, personne n’a véritablement payé le prix. Nul doute qu’il faut réviser la loi, dans sa lettre et dans son esprit. Sur la question, les constitutionnalistes occupent à volonté la scène pour tenter de convaincre l’opinion de l’inévitable révision de la Constitution du 11 décembre 1990. Alors, la volonté politique restera la seule alternative crédible contre l’impunité. Il faut déjà renforcer la Chambre des comptes de la Cour suprême. Car, avec l’institutionnalisation de la Cena, il est désormais clair qu’on ne peut tout remettre à la charge de la révision de la loi fondamentale. Faut-il aller à une dissolution de la Haute Cour de la justice ?



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