Baccalauréat session de juin 2024 : A la rencontre d’une candidate malheureuse

18 juillet 2024

(Après la déception, le courage salutaire pour aller de l’avant)

L’échec est pour certains un passage obligé et pour d’autres une erreur de parcours, une fatalité. Pour Marine (nom d’emprunt) candidate malheureuse au Baccalauréat session de juin 2024, son échec est brutal et violent. Si bien que le revers subi lors de son dernier combat face aux épreuves écrites du Bac 2024 l’a menée à traverser une dépression dont elle s’est remise en se rappelant quotidiennement que demain sera meilleur. Un exemple que les candidats qui n’ont pas pu tirer leur épingle du jeu doivent suivre au lieu de décider d’écourter leur durée de vie.

Le 10 juillet 2024, vers 20 heures, Marine se reposait couchée sur le dos, figée, dans la cour de sa maison basée à Houègbo, commune de Toffo. Elle venait de perdre son année scolaire après plusieurs mois de labeur. La jeune fille, portée pourtant par de légitimes chances, a eu du mal à se relever par la suite, au sens propre et figuré. « Lorsqu’après la proclamation des résultats, je me suis rendu compte que je ne suis pas admise, je me suis dit que rien dans ma vie ne pouvait être pire que ça », confie-t-elle d’un air serein mais pitoyable. Plusieurs mois de cours assidus sous la pluie comme sous le soleil, des exercices, des révisions ou encore les séances de bachotage, « tous les jours de cette année scolaire » ont également contribué à plonger la jeune candidate d’environ 22 ans dans le noir. « Si je me souviens de toutes ces peines, je coule des larmes. C’est dégueulasse ! », ajoute-t-elle, comme si elle avait besoin de preuves pour justifier à quel point les 09 derniers mois ont été tumultueux.
Avec le recul, elle explique cette mésaventure par la manière dont elle approchait les matières les plus importantes à savoir les SVT, PCT et Mathématiques, car faisant la série D. « Quel que soit le contenu des épreuves, en classe, lors des contrôles de connaissances, lors des devoirs ou au cours de nos séances d’exercices, je me retrouvais et trouvais les solutions concrètes ». Mais en examen blanc, « je commence à stresser. Comme l’athlète, proche d’une médaille, proche de son objectif, mon cerveau est chamboulé », raconte la ressortissante de l’une commune du département de l’Atlantique. Son désir de vaincre, se traduisait même par une obsession pour l’excellence tant dans sa préparation que dans ses rendements comme le justifient ces enseignants de PCT et Mathématiques. Marine a toutefois réalisé que si elle n’avait encore jamais touché le Bac, c’est que cette finalité définie par une irréprochabilité idyllique n’était sans doute qu’une illusion à laquelle elle devait cesser de s’accrocher pour avancer. « Naturellement, je suis une femme battante. Disponible pour apprendre. J’ai toujours voulu que tout soit parfait, malheureusement, je sais que ce n’est pas normal », a-t-elle expliqué.
Maintenant qu’elle n’est pas invitée à aller aux épreuves sportives de ce même Baccalauréat qui se sont achevées hier même, la très humble candidate compte changer la trame narrative de sa propre histoire. D’ailleurs, reconnaît-elle, c’est une expérience de Bernoulli : soit ça marche, soit ça ne marche pas. « C’est comme un film. A un moment donné, il y a continuellement un épisode qui fait tout chavirer. Mais aussi, il y a un élément déclencheur qui fait que la vedette du film se reconstruit. Et je suis là-dedans présentement, dans mon propre film ».

Des consolations...

Si la plupart de ses camarades n’ont jamais pensé à cette réussite reportée de Marine, parce que la connaissant intelligente, dans cette éprouvante mais grisante tentative de remonter la pente, la jeune femme a tout de même reçu une ribambelle de consolations. Lesquelles l’ayant propulsée encore plus à croire en son avenir. « Quelques heures après la mauvaise nouvelle, mes parents m’ont consolée. Ils m’ont donné plus d’amour qu’il ne fallait. Ils ne m’ont pas rejeté. Mes enseignants, mes camarades, mes amis de tous genres et de tous les âges, m’ont réconfortée avec des mots doux. En gros, je ne me suis pas sentie seule », déballe la source. Avec leur soutien, sa mentalité a changé. « Dorénavant, je me dois de me prouver que je suis encore capable. Avoir le Baccalauréat 2025 avec une bonne moyenne, c’est possible. J’y crois dur comme fer ». La prochaine étape, poursuit-elle, c’est d’aller « retirer mon relevé de notes dès qu’il sera disponible afin d’examiner les matières dans lesquelles j’ai fait chou blanc », annonce-t-elle. « La pression, pour moi, c’était à la proclamation. Le stress aussi. Je l’ai sorti et maintenant je peux me concentrer sur l’avenir et je suis plus relaxe », dit-elle en se reculant sur le dossier de sa chaise, comme par tranquillité. « Mon échec est inadmissible. Mais je l’ai géré comme n’importe quel tournoi. C’est un relâchement de stress, parce que je voulais vraiment aller à l’université l’année académique prochaine, la nature en a décidé autrement », regrette-elle. En fait, elle a réagi comme son instinct le lui a dicté. Toute sa vie, confient ses proches, elle a dû s’adapter.

Ces actes ignobles...
Qu’il vous souvienne qu’après la proclamation des résultats du Brevet d’études du premier cycle, session de juin 2024, une candidate résidant à Allada dans le département de l’Atlantique, s’est donnée la mort après avoir appris qu’elle a échoué. C’est un acte ignoble, diront les observateurs de la société à la suite de ce drame. Le fait de se donner volontairement la mort près un échec est un signe d’incapacité comme l’explique le spiritualiste Tundé Ahissou. Pour lui, les parents doivent témoigner leur amour à l’enfant qui a été recalé pour un examen, concours ou une quelconque compétition.

"Un courage hors pair"

La posture de cette candidate malheureuse au Baccalauréat session de juin 2024 est à saluer comme le reconnaît Ariane Ahyitè, sociologue. "C’est vraiment salutaire. Et il faut que les autres candidats qui n’ont pas pu tirer leur épingle du jeu lui emboîtent le pas", recommande la sociologue. Somme toute, ce comportement adopté par Marine doit être un cas d’école pour tous les autres candidats de la bande 43, 07  (taux des inadmissibles). Les sages diront que pour un avenir meilleur, il faut tout au moins un brin d’échec. Autrement, l’échec est une réussite reportée !

Mahussé Barnabé AÏSSI (Coll.)



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