Cycle menstruel pour les sportives de haut niveau : Du tabou à la réalité… l'influence des règles sur leurs performances

2 février 2024

La menstruation a toujours été un sujet tabou, pourtant dans ce laps de temps, il y a des contraintes pour les sportives de haut niveau. Même si certaines parviennent à surmonter ces périodes difficiles pendant les différents championnats sportifs disputés, il n’empêche qu’il y a matière à se poser des questions sur la pratique du sport par la gent féminine liées au cycle mensuel et les contraintes liées à ce malaise.

C’est un sujet fréquemment discuté par le média chinois, le Weibo. Pendant les jeux olympiques de Rio d’août 2016, la nageuse Fu Yuanhui a brisé le tabou sur ses règles. Lui posant des questions sur sa contre-performance au relais 4x100 mètres féminin, la célébrissime nageuse explique sans langue de bois sur la télévision centrale de la Chine (Cctv), que ses « règles » étaient « arrivées » la veille de la compétition, et donc elle se sentait « particulièrement fatiguée ». Cela est un justificatif probant de sa faible performance pendant la compétition. Citée par la même chaine de télévision, elle faisait aussi comprendre qu’elle ne pouvait pas fournir assez d’effort que ça pendant la compétition. Puisque ayant mal à l’estomac, « Je crois que je n’ai pas bien nagé aujourd’hui. J’ai l’impression d’avoir laissé tomber mes coéquipières ».

Des joueuses déconcertées
En janvier 2015, la joueuse de tennis Heather Watson a éclairé dès sa sortie du premier tour de l’Open d’Australie sur les causes plausibles de son élimination. Elle estimait que c’était dû à « un truc de filles ». Maux de ventre, manque d’énergie, crampes, manque de sommeil, bouffées de chaleur, les championnes interrogées ont expliqué comment elles s’y prennent pendant les entraînements ou les compétitions quand elles sont dans cette période du mois. Selon des sources concordantes, certaines, comme Charlotte Bonnet, reconnaissent qu’elles deviennent parfois paranoiaques. « Penser à changer de tampon, savoir si ça ne va pas couler, c’est très pénible », a-t-elle dit. Les sportives sont cependant peu nombreuses à en parler à leurs coachs, souvent masculins. Olivier Krumbholz, sélectionneur de l’équipe de France féminine de handball confie ne jamais avoir « eu une discussion à ce sujet » avec les joueuses. Elles préfèrent en parler au médecin de l’équipe. Ce dernier ne prend pas le sujet à la légère : les règles peuvent être une source de blessure, la joueuse pouvant être « moins concentrée », ou « son bassin mal positionné » par exemple. Il explique que les joueuses sont nombreuses à avoir recours à la pilule contraceptive, qui a l’avantage de rendre les cycles plus réguliers, moins douloureux et les pertes moins abondantes. La possibilité d’enchaîner des plaquettes pour retarder l’arrivée des règles ne se prête pas, en revanche, à tous les sports. Certains calendriers qui s’étalent sur toute l’année, comme en tennis, rendant cette option caduque. L’absence involontaire de règles (l’aménorrhée spontanée), qui touche 10 à 40 % des femmes selon les sports, est aussi un sujet d’inquiétude médicale, la diminution des sécrétions d’œstrogènes ayant un impact sur la densité osseuse et pouvant notamment provoquer des fractures de fatigue, relève l’article.

Comment s’y prendre ?
Les sportives souffrent en fait plus du syndrome prémenstruel (Spm), qui survient les jours précédant l’arrivée des règles, que des douleurs pendant les menstruations, « atténuées par l’adrénaline de la compétition », explique l’enquête, citant l’exemple de la marathonienne Paula Radcliffe, qui a battu son premier record du monde en 2002 à Chicago alors que ses règles venaient de démarrer le matin même. Selon une étude menée par Carole Maître, gynécologue de l’Institut national du sport, de l’expertise et de la performance (Insep), en 2008-2009, 37% des sportives considèrent la douleur des règles comme un handicap à leur activité nécessitant un traitement, et 64 % pensent que le syndrome prémenstruel diminue significativement leur performance. Lors de la Coupe du monde de football féminin, l’équipe américaine a épaté le public avec son jeu direct et offensif. Sacrées championnes, les joueuses ont également dévoilé comment elles gèrent leurs cycles de menstruation. Elles ont utilisé l’application FitrWoman, qui permet d’ajuster l’alimentation et l’entraînement en fonction de la phase du cycle menstruel dans laquelle se trouve l’athlète. Cet outil développé par Georgie Bruinvels, chercheuse du University College de Londres, se base sur la corrélation entre les carences en fer et les menstruations chez les sportives de haut niveau. Cependant, combien sont ces sportives qui ont osé donner la véritable raison de leur piètre performance comme si c’était moins honteux. Alors qu’une femme saigne en moyenne six ans et demi sans arrêt dans sa vie, les menstruations sont toujours, en 2017, considérées comme « un truc un peu sale et tellement intime qu’il faudrait le taire et le cacher », écrivent les journalistes Béatrice Avignon, Chrystelle Bonnet et Nicolas Herbelot, qui ont interrogé une dizaine de championnes de natation, boxe, karaté ou basket. Plusieurs sportives sollicitées ont aussi refusé de témoigner, preuve de la réalité de cette honte entourant les règles.
Ce qu’il faut retenir, le syndrome prémenstruel agit beaucoup plus sur la performance des sportives que l’apparition des règles elles-mêmes. Les athlètes interrogées souffrent des symptômes à l’apparition des menstrues mais elles arrivent à les surmonter. Ces maux ne sont que, disent-elles « passagères dans la plupart du temps ». Il n’empêche qu’il faut une prise de conscience surtout des entraîneurs mais aussi des joueuses qui ont tendance à minimiser l’influence des règles sur leurs performances. Pour l’instant, l’une des solutions palliatives serait de former davantage de meilleurs médecins du sport, et une féminisation du métier.



Dans la même rubrique