Loi sur la SSR encadrant l’avortement sécurisé au Bénin : COJAS et Ipas Afrique Francophone aplanissent le chemin pour un décret d’application clair et inclusif

14 mars 2023

La Coalition des Jeunes pour l’Avortement sécurisé (COJAS) et IPAS Afrique Francophone ont organisé ce 10 mars à Cotonou, une causerie-débat avec une diversité d’acteurs impliqués dans la Santé Sexuelle et Reproductive des Femmes au Bénin. Une initiative qui vise à relever les inquiétudes des différents acteurs du domaine afin d’acter la prise d’un decret d’application qui clarifie la compétence de chacun ainsi que les modalités de son exercice.

La loi N° 2021-12 modifiant et complétant la loi n° 2003-04 du 03 mars 2003 relative à la santé sexuelle et à la reproduction, est en vigueur au Bénin depuis bientôt deux ans. Pourtant son décret d’application tarde à venir et les différents acteurs du domaine s’impatientent de clarifier le flou juridique qui prévaut.
Selon Kifayath Chabi, jeune championne au sein de la Cojas, cette rencontre qui vient au lendemain de la célébration de la Journée Internationale des droits des femmes, ambitionne de rendre spéciale cette édition et de faire un pas dans l’amélioration des conditions des femmes et filles au Bénin. « Nous avons organisé cette séance pour analyser davantage l’environnement de l’AS au Bénin. Il est question de savoir où nous en sommes, ce qui reste à faire, qui sont impliqués dans cette communauté d’acteurs et quel est leur rôle », a-t-elle précisé.
À cet effet, juristes, membres d’organisations de la société civile sur la SSR, Organisations de jeunes, médecins, sages-femmes, infirmiers, juristes et professionnels des médias ont visionné une vidéo sur l’état de mise en œuvre de la loi SSR relative à l’AS au Bénin depuis sa promulgation. Elle a débouché sur des échanges nourris au sujet des non-dits et des attentes de chaque catégorie d’acteurs.

Les griefs des oubliés de la loi modifiée
Sur plusieurs points, la loi N° 2021-12 est restée imprécise pour de nombreux participants. Il s’agit notamment de la compétence des sages-femmes et infirmières à offrir les services d’avortements sécurisés au même titre que les médecins. Au fil des débats, les positions ont divergé selon qu’on est prestataire de service de santé, acteur de la société civile ou juriste. Les sages-femmes et infirmières par exemple se sentent oubliées. La corporation estime que la compétence des médecins et des assistants sociaux évoqués à l’article 17 est claire, mais pas la leur.
« On a compris qu’on a oublié les infirmiers et les sages femmes qui sont des personnes qualifiées et qui offraient ce service sous l’ancienne loi. Or dans les localités reculées, il y a des centres de santé privés ou publics gérés par des infirmiers ou sages femmes. Est-ce à dire que ces personnes qui officient dans ces centres ne pourraient plus offrir ce service aux femmes qui le souhaitent ? », s’interroge Amour Aguiar, sage femme.
En plus de cet aspect, les participants se sont prononcés sur le rôle des acteurs de la société civile quant au référencement des demandeuses de ce service de santé auprès des structures appropriées, du nombre limite d’avortements sécurisés qui pourraient être pratiqués sur une demandeuse, etc.

Pour un décret d’application précis et inclusif
Si les positions ont été aussi variées sur les aspects non clarifiés de la loi, il démontre surtout que la prise du décret d’application est de plus en plus urgente. Car confie une participante, « la loi a été votée, mais en l’absence du décret d’application les avortements clandestins continuent. Cela n’a pas empêché les non professionnels de s’arroger les titres de personnes qualifiés pour pratiquer l’avortement. »
Pour la Cojas et IPAS Afrique Francophone, les attentes des participants ne resteront pas lettre morte. « Nous avons pris note de beaucoup de choses et allons formaliser ces recommandations dans une note de plaidoyer afin de répondre aux préoccupations de chaque acteur » assure Kifayath Chabi.
Ainsi, les participants se félicitent d’avoir fait évoluer le débat à travers leurs différentes contributions. Pour eux, la balle est désormais dans le camp du gouvernement, pour véritablement faciliter l’accès aux soins d’avortements sécurisés à toutes les femmes béninoises, quelles que soient leurs localités.



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