Voix d'homme : Aliou Djialiri, « La femme est une coéquipière et non un outil »

14 mars 2024

Jeune médecin, Aliou Djialiri est spécialiste de santé communautaire. Après ses expériences à la tête d’une maternité de Nikki et avec le projet Santé Sud Communautaire, il est intervenu 3 années Durant à la prison civile de Parakou. Marié et père de 3 filles, l’actuel Directeur Exécutif de l’Association Bénin Excellence est passionné du management de la gestion des risques.

- Selon votre conception des choses, qui est la femme ?
La femme est celle qui donne la vie. Je m’en suis rendu compte le premier jour de mon premier stage. Débarquer directement en salle d’accouchement, être au contact de la souffrance endurée par les parturientes, m’a bouleversé. Considérant tout cela, je me dis que les enfants sont naturellement plus liés à la femme qu’à l’homme, même si nos sociétés sont patriarcales.
Par ailleurs, la femme est un être d’équilibre. Elle est la colonne vertébrale de la société. Cela est aussi valable dans le foyer qui lui doit aussi sa stabilité tant que son cœur peut pardonner. Je suis convaincu que la valeur résiduelle d’un foyer est supérieure ou égale à celle de la femme, mais jamais inférieure. Une femme qui mange du poisson, en fera assurément manger à sa maison ou se privera pour que celle-ci en mange. La femme se bat toujours pour le bien-être des siens, ce qui n’est toujours pas le cas de l’homme. L’homme a été fait fort par ses muscles, par les hormones qui circulent dans son corps mais le sexe fort est en réalité le sexe féminin.

- Quelle est votre appréciation de la « soumission de la femme » ?
Dans le foyer, je considère la femme comme une coéquipière et non un outil. Je le vois comme une entreprise pour laquelle homme et femme s’associent pour porter à bien leur vision commune. La femme est membre à part égale du noyau familial dès sa constitution. Ensemble, tous les deux définissent dès la base, leurs valeurs et leur fonctionnement. Aussi, est-il mieux adapté de laisser à l’homme, le lead de la politique familiale définie à deux. Cela permet de satisfaire ce besoin d’autorité qui est propre à l’homme et qui le rassure de sa virilité et par la même occasion, de son utilité dans le foyer. C’est une assurance qui est capitale pour l’homme dans la mesure où seule cette autorité lui indique que son avis compte dans la vie des siens ; la proximité avec les enfants, la tenue de la maison et autres étant souvent investis naturellement par la femme.
La reconnaissance de cette autorité, le don de cette place à l’homme par la femme est ce que j’appelle la soumission.
C’est un ensemble d’attentions qui comptent pour l’homme. Dans le même élan, l’homme doit valoriser la femme et lui témoigner du respect afin de l’amener à se plaire librement et sans contrainte, à lui confier ce lead. Finalement, c’est un cercle qui devrait être vertueux, dans le dialogue, l’écoute mutuelle et compréhensive. La soumission n’est pas de l’esclavage, elle n’est pas à confondre avec la domination qui amène l’homme à écraser la femme. Baisser les yeux quand l’homme parle, s’asseoir à distance de l’homme, lui obéir au doigt et à l’œil, lui ‘’servir le sexe’’ quel que soit l’état d’âme de la femme, la brimer, l’empêcher de travailler sont autant d’attentes qui ne relèvent pas du tout de la soumission : c’est la chosification.

- Que craignent les hommes qui empêchent leurs femmes de travailler ?
Deux choses à mon avis.
La première est la jalousie. Imaginer sa femme désirée par d’autres hommes dans un espace qu’ils ne contrôlent pas, éveille un sentiment d’insécurité chez ces hommes. Leur refus résulte de leur propre manque de confiance projeté sur leurs femmes.
La seconde est la peur de voir ces femmes accéder à une autonomie financière. Ils l’appréhendent comme une menace pour leur lead, leur utilité de pourvoyeur des moyens financiers dans le foyer. Malheureusement, certains hommes exploitent leur pouvoir financier comme une arme de pression et d’asservissement de la femme pour camoufler leur mal-être. Il leur faut développer les aptitudes du bon leadership pour que les deux deviennent des coéquipiers qui s’épanouissent ensemble.

- Quel regard portez-vous sur la célébration du 08 mars ?
C’est un jour qui commémore des évènements tristes et rappelle les luttes féminines pour la reconnaissance des droits de la femme. La mémoire des femmes martyrs, celles qui ont combattu, doit être saluée. Aussi est-ce un jour pour rappeler le rôle joué par les femmes dans nos sociétés. C’est un appel à des gestes (même petits) tous les autres jours de l’année pour promouvoir la femme.
Propos recueillis par Frédhy-Armel BOCOVO (Coll)



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